Sunday, June 9, 2013

Toy Story

Tu m’as abandonné. Maintenant que tu as eu ce que tu voulais, maintenant que je suis déchiré, tu m’as abandonné. Tu m’as tout simplement laissé là comme un chiffon usé, sans même faire attention. Tu es juste passé à autre chose. Je l’avais vu venir pourtant.

Dès le premier regard, tu m’as voulu. Tu en avais déjà plein des jouets. Mais ils ne comptaient plus, c’est moi que tu voulais. Moi, cette poupée parfaite. Tu as fait un caprice. Tu as volontairement cassé d’autres jouets. Juste pour qu’on te remarque, qu’on comprenne ce que tu voulais. Et tu m’as eu. Tu étais heureuse, enfin. Je ne te quittais plus. A toute heure de la journée, de la nuit, j’étais dans tes bras. J’étais ton nouveau doudou, celui que tu ne pouvais pas ne pas avoir avec toi. Ta nouvelle peluche sans laquelle tu ne pouvais dormir. Je me sentais utile. Je me sentais aimé. Je me sentais heureux.

Mais tu en veux plus, toujours plus. Tu en trouves toujours un plus brillant. Un qui te fait oublier le précédent. Et pour avoir le nouveau, tu n’hésites pas à utiliser celui que tu as déjà. Tu tenais plus à moi qu’à n’importe quelle autre de tes anciennes peluches, alors tu as fait attention. Tu ne voulais pas m’abîmer. Tu me protégeais. Même quand tu avais réussi ton nouveau caprice, tu dormais toujours avec moi. Tu m’aimais toujours, même si je n’étais plus ton préféré.

Jusqu’au jour où tu as arrêté. Tu n’as plus eu besoin de moi. Tu as grandi, tu es passé à autre chose. Les peluches c’est fini pour toi. Et comme pour marquer la fin d’une époque, tu m’as encore utilisé pour ton dernier caprice. Et cette fois sans te retenir. Sans me protéger. Je suis resté seul, au fond d’un placard, déchiré. Plus aucun enfant ne pourra vouloir de moi après ça. Je ne suis plus un jouet. Je ne suis plus qu’un déchet qui attend désespérément d’être jeté.

Sunday, June 2, 2013

Partir un jour


Je n’en peux plus. Cette vie ne me convient plus. Trop de pression. On attend trop de moi. Je n’arrive plus à m’endormir le soir, par peur de me réveiller le lendemain. Je n’arrive pas à me réveiller le matin car la journée qui m’attend me dégoûte. Ce rythme effréné au travail, avec 5 urgences par seconde demandant mon avis à moi, nommé expert technique d’une multinationale quelques mois plus tôt, m’étouffe. Ce besoin de me parler qu’ont mes amis, encore une fois de rechercher des conseils auprès de moi, me fatigue. Cette attention demandée par une famille que je n’ai pas choisi m’ennuie. Je suis à bout.

C’est décidé, je pars. Sans rien dire. À personne. Ni à mes parents, ni à mon supérieur, ni à ma fiancée. Je pars loin. À l’autre bout de la France, de l’Europe, du monde. Je ne sais pas où mais je pars. J’abandonne cette vie et je ne me retournerai pas. Je n’embarque aucun moyen d’être contacté, je ne prends que ma carte d’identité, du liquide et des vêtements, juste de quoi passer la frontière. Cette vie ne me convenait plus, depuis des mois. J’en étais devenu misérable. Je me suis laissé faire, il était temps que j’agisse.

Enfin. Je suis parti. J’ai juste disparu. Nouvelle identité, nouveau travail, nouvelle vie. Je n’ai plus d’attache, plus d’amis, plus de famille. Je suis libre. J’en suis à mon troisième pays en deux ans. Je ne veux plus d’attache. Plus de pression, plus de souffrance. Je veux juste vivre. Faire ce que je veux, quand je le veux, avec qui je le veux. Et dès qu’on attend quelque chose de moi je pars. Une promotion en tant que responsable d’équipe ? Je pars. Une nouvelle connaissance avec qui j’ai passé quelques nuits agréables ? Je pars. Une personne qui commence à se confier ? Je pars.

Je fuis.